L'INTÉGRATION ET LA COOPÉRATION DE DÉFENSE EN EUROPE
La mise à l’agenda de la coopération de défense en Europe
Aucune coopération de défense n’est naturelle et ne peut donc être détachée du contexte politique et économique à l’intérieur duquel elle s’inscrit. On peut coopérer pour des raisons stratégiques (e.g. pour maximiser la sécurité collective), opérationnelles (e.g. pour augmenter l’interopérabilité des armées), politiques (e.g. pour influencer la politique de défense d’un autre État membre ou encore d’un État tiers) et économiques (e.g. pour bénéficier des économies d’échelle, notamment pour le volet industriel de la politique de défense). Ce qui importe est que chaque État coopérant y trouve un intérêt et un sens.
L’objectif principal de nos travaux sur la mise à l’agenda de la coopération en matière de défense est de mieux comprendre comment et sous quel angle cet enjeu émerge en Europe. Nos recherches montrent que la coopération européenne de défense a toujours été un enjeu volatile. Cela veut dire qu’il y a eu des périodes d’enthousiasme – qui ont, par exemple, permis de mettre en place les institutions nécessaires à la coopération et d’opérationnaliser celles-ci – et des périodes de stabilité, avec peu ou pas de changements, pendant lesquelles la défense n’était pas particulièrement prioritaire au niveau européen.
Dans le cas de la France, nos travaux montrent que la coopération est devenue une réalité pour les armées françaises depuis la fin de la Guerre froide. La France a en effet commencé à développer une approche « flexilatérale » à sa politique de défense, contribuant à de nombreux dispositifs avec un ou plusieurs partenaires. Certains reposent sur des institutions dédiées – au sein ou en dehors d’un cadre multilatéral – alors que d’autres sont plus informels, voire plus ponctuels. Nos travaux dressent ici un panorama des coopérations de défense au niveau étatique, et montrent la diversification de celles-ci depuis les années 1990.
La coopération européenne dans le MCO
Dans un contexte où les coûts d’acquisition et de maintenance tendent à augmenter, avec des budgets qui restent fortement contraints, la taille des flottes d’équipements militaires (aéronefs, blindés, navires) tend à diminuer dans la plupart des pays européens. La coopération dans le MCO est une possibilité offerte aux différents pays européens pour contenir la hausse des coûts (économies d’échelle, effets de spécialisation) tout en contribuant à la construction d‘une Europe de la défense dans une approche bottom-up.
La coopération dans le soutien est aujourd’hui soutenue et encouragée par l’Agence Européenne de Défense et l’OTAN. Des initiatives existent et se développent, notamment dans le domaine naval ou encore des hélicoptères. Cependant, elle demeure encore limitée en raison d’une hétérogénéité dans les préférences des nations, notamment pour des activités souveraines.
Les budgets de défense au sein de l’UE
En lien avec nos travaux sur la mise à l’agenda des coopérations de défense en Europe, se pose donc également la question de leurs bénéfices économiques.
Compte tenu de la multiplicité des sources possibles, faire des comparaisons internationales est une tâche difficile : problèmes de périmètre (dans le temps et entre pays), difficultés à avoir des données fiables, choix des indicateurs pertinents, etc.
Par ailleurs, il faut disposer d’une grille de lecture permettant de comprendre les grandes évolutions pour mettre en évidence les menaces et les zones de tension. En outre, le concept de « budget de défense » est défini dans une encyclopédie.
Sur la base de données internationales, un travail de recherche a été réalisé afin de mesurer la nature des déséquilibres budgétaires au sein de l’UE sous l’hypothèse que cette dernière serait une alliance. Les résultats montrent de fortes différences dans les contributions des pays européens dans de multiples dimensions (budget total, budget d’équipement, budget de R&D, budget de personnel, troupes déployés). Cela suggère que les politiques de défense au sein des pays de l’UE ne sont pas encore intégrées.
Enfin, une analyse méthodologique sur l’usage des dépenses de défense pour mesurer la puissance et la sécurité a été proposée afin de montrer qu’elles sont utiles mais insuffisantes pour comprendre globalement ces phénomènes.